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1er février

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Ce matin le ciel était bleu, le soleil radieux, pour un peu je me serais cru dans une chanson d’amour. J’avais le nez en l’air. La rue sentait bon. Les fleurettes des balcons offraient le meilleur de leurs pétales. Dans leurs cages, de ravissants inséparables gazouillaient. Les charmants commerçants, sous leur coiffe de métier et dans leur tablier éclatant, en me voyant approcher y allaient d’un mot gentil, d’un clin d’œil complice, certains s’inquiétant de ma santé, et tous, sans la moindre exception, m’offrant un sonore et franc bonjour qui reflétait l’humanité dans ce qu’elle a de plus beau, de plus riche et de plus confraternel. L’arc-en-ciel, si rare ici en cette saison, s’étendait entre l’église et la mairie en survolant la mosquée et la synagogue. Seigneur, cette fois tout était parfait. Chapeau ! Des nuées de colombes voletaient au dessus des toits roses, et de somptueuses plantes grimpantes aux feuilles alertes et bleutées jaillissaient d’entre les pavés disjoints de la vieille cité pour fuser vers le ciel. De jeunes mamans au ventre gorgé d’amour passaient au milieu des rues sans voitures, et les enfants bruns, blonds et roux jouaient autour des fontaines d’eau fraîche et pétillante où d’aimables ouvriers moustachus venaient remplir leur gourde métallique, qu’ils accrochaient à leur salopette immaculée en se dirigeant, joyeux, vers les usines claires et silencieuses pour y accomplir une tâche épanouissante. Déjà, venues des cieux, chantaient les cordes des violons, bientôt rejointes par les trompes et les chœurs des angelots aux joues rondes, aux ailes blanches, pures et innocentes. Je sentais à mon cou pendre une médaille dont le poids indiquait la rareté de son métal et sa valeur. J’étais à deux doigts de me prendre pour un personnage important ! Une figure ! Un élu, sans doute, ou un notaire, un notable. Enfin, quelqu’un d’utile et de précieux. Et plus j’avançais, plus mon sourire s’épanouissait. Sans doute qu’il existe un mot pour décrire ce merveilleux instant. Il se pourrait bien que ce soit le bonheur. Oui. C’est ça ! J’étais heureux, et tout, absolument tout, était parfaitement merveilleux.

Il n’épargna pas la semelle de mon soulier, l’étron noir et gras qu’un cabot venait de perdre sur le trottoir défoncé qui longe la poste ! La félicité, qui avait jusque-là dirigé mes pas, s’estompa rapidement. Brusquement, les serins s’étranglèrent, les colombes s’enfuirent. Bougons, les commerçants retournèrent à leurs occupations au fond de leurs sombres arrière-boutiques que la crasse n’avait pas épargnées. Les fleurs des balcons prirent un sérieux coup de mou, l’arc-en-ciel s’effaça. Le maire, le curé, le rabbin et l’iman se tournèrent le dos comme les autres jours. Les pavés disjoints d’où s’envolaient tout à l’heure vers les cieux limpides les gigantesques plantes, se refermèrent instantanément, tandis que les violes et les cors s’étalaient en un effrayant fracas sur la tête des angelots ! Les mamans attifées à la va-comme-je-te-pousse tiraient leurs morveuses marmailles vers la crèche, avant de rejoindre leurs époux saouls de fatigue et de mauvais vin à l’usine dans le bruit, la sueur et les fumées corrosives. Dans la seconde qui suivit, la médaille qui pendait à mon cou quitta l’or pour un exécrable chocolat, et la pluie verglaçante refit son apparition. Je redevins alors l’anonyme de la veille, l’inutile, le triste, le voûté, celui auquel on n’adresse plus la parole et que nulle part on n’attend.
Faut pas rigoler avec le mois de janvier !

Après le bureau de la poste, il y a cette longue rue qui grimpe. Ligne droite sans aucune possibilité de se protéger du vent. Les voitures frôlent le passant. Les flaques explosent au passage des roues. Il n’est pas rare d’y croiser le cadavre d’un chat ! Cette rue qui semble ne jamais vouloir s’achever est à coup sûr l’œuvre d’un architecte fou. Un triste visionnaire venu ici tracer la route qui conduit aux terres infernales les âmes interdites de repos. Jamais je n’y ai vu jouer un enfant. Les rares chiens qui la traversent le font en hurlant comme s’ils y recevaient des coups de bâton ou qu’on leur jetait des pierres. Un riverain m’a dit en avoir vu de magnifiques y pénétrer en jouant, et en sortir quelques instants plus tard couverts de sang, le poil arraché et les membres brisés. Une brigade de protection des animaux est restée à guetter toute une année avec des jumelles pour voir qui lançait des pierres. Elle ne trouva jamais rien ni personne. Les chiens entraient en parfaite santé et quittaient quelques instants plus tard la route avec d’abominables mutilations. Il ne fait aucun doute que cette voie est maudite ! Toutes les deux ou trois années, la municipalité est tenue d’y replanter des arbres. Il suffit de quelques mois pour qu’ils s’étiolent et dépérissent. Tous finissent comme leurs prédécesseurs, racornis, sans écorce, sans jamais avoir fait la moindre feuille, la moindre fleur, le moindre fruit, et leurs racines maigres et poreuses sont incapables de porter leurs lourds troncs qui n’en finissent plus de grimper, ni leurs branches fluettes. Un jour comme celui-ci, lorsque le vent souffle un peu fort, les racines semblent vouloir s’en aller promener ailleurs. Elles arrachent le macadam et on s’attend presque à les voir marcher, mais ce n’est qu’une illusion. Les arbres malades tombent sur la chaussée, généralement lorsqu’un autocar scolaire passe. Les accidents sont chaque fois indicibles et mortels, et les blessures irrémédiables pour les survivants !

C’est au bout de cette route que se situe l’épicerie. D’ordinaire, j’évite de me rendre dans celle-ci que pourtant de nombreuses personnes m’ont déjà recommandée, et je profite de ma voiture pour découvrir les hypers des villages du coin. Ce matin ma voiture, malgré le beau temps, n’a pas voulu démarrer. Il me fallait quelques fruits, des œufs et une baguette. J’ai pris la route. Après tout, même si c’est un peu loin et si le trajet n’est guère engageant, ça fait une balade. C’est étrange comme parfois les choses sont irrationnelles. Il faisait beau. J’ai foulé la déjection canine, et le temps a soudain basculé vers la tempête. Il faut à présent que j’avance. Je n’ai plus d’autre solution. Je suis déjà trop loin pour faire marche arrière. La pluie me gifle. Le vent hurle. Allez, encore un effort ! J’y serai bientôt.

La façade de l’épicerie ne se distingue pas des autres maisons qui la cernent. S’il n’y avait eu le triste néon qui clignote, je serais certainement passé devant sans m’arrêter. J’ai poussé la porte. Je m’attendais à l’entendre grincer. Il n’en a rien été. La boutique est proprette. Les fruits sont parfaitement alignés. Calibrés. Astiqués. Ce n’est pas le choix qui manque. Une discrète musique accompagne le client. L’épicier est sorti de son arrière-boutique en s’essuyant les mains. J’ai eu l’impression que ma présence le mettait mal à l’aise. Son sourire a semblé se figer quand il m’a vu. Il a néanmoins conservé son sang-froid et m’a poliment demandé ce que je voulais. J’ai passé ma commande. Il s’est absenté quelques instants, avant de revenir avec un sac dans lequel il a déposé le pain, les fruits et les œufs. J’ai réglé ma note. Au moment où j’allais quitter sa boutique, il m’a lancé un truc du genre : « Couvrez-vous bien, je crois que nous aurons de la pluie pour toute la journée ! Bonne route ! » J’avais craint de rencontrer un monstre. Le bonhomme était tout à fait ordinaire, à l’exception de la moustache rousse qui lui barrait le visage. À droite de la porte, il y avait un miroir devant lequel je me suis arrêté. Le masque avait très bien tenu. Mes cornes étaient restées discrètes sous la mousse de latex. J’ai senti mes sabots fendus s’agiter de satisfaction au fond de mes bottines et j’ai dû faire un effort pour ne pas lâcher un jet de gaz méphitique.
J’ai repris la route à l’envers.
Loin devant, un chien se mit à hurler.
À mi-parcours, un camion porteur d’acide s’était renversé sous la poussée d’un arbre mort.

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